MÉMOIRE DES MANUFACTURIERS ET EXPORTATEURS DU CANADA – DIVISION DU NOUVEAU-BRUNSWICK

RÉSUMÉ

Les manufacturiers et exportateurs du Canada sont un segment essentiel de notre trame économique et sociale. Ils représentent plus de 20 % du PIB canadien et emploient directement près de 2 millions de Canadiens. Ce secteur est également crucial pour le Nouveau-Brunswick, qui est la troisième économie à plus forte intensité de fabrication au Canada. En outre, le commerce des biens et services est essentiel pour créer de la richesse réelle dans le pays. C’est particulièrement vrai au Nouveau-Brunswick, la province canadienne qui dépend le plus du commerce.

Mais le secteur manufacturier du Canada a subi une métamorphose. L’émergence de producteurs à faibles coûts très dynamiques dans les pays en développement a forcé les producteurs de l’Occident à « repenser » leurs affaires. Plus que jamais, il faut se cristalliser sur l’innovation et la productivité pour faire grandir la capacité d’innovation et assurer la contribution continue du secteur.

En réaction à la « Grande Récession », le gouvernement fédéral a déposé le « Plan d’action économique ». Il a présenté des mesures de relance, qui représentaient une intervention publique sans précédent sur le marché. Le redressement de l’économie mondiale après cette Grande Récession s’est accéléré l’an dernier, en grande partie à la faveur de la demande de produits de base dans les pays en développement. Son économie étant surtout axée sur les ressources, le Canada s’est sorti de la pire crise économique des sept dernières décennies en meilleure posture que la plupart des pays industrialisés.

Le budget fédéral de l’an dernier a présenté la prochaine phase du Plan d’action. Il mettait l’accent sur la création des bonnes conditions pour assurer la prospérité économique à long terme (c.-à-d. amélioration des régimes de l’impôt et de la réglementation), afin que le secteur privé devienne le moteur de la croissance et de la création d’emplois. MEC a félicité le gouvernement pour ses initiatives face à la crise économique mondiale, ainsi que pour sa volonté de solidifier les assises. Mais les manufacturiers ont encore de réels défis à surmonter.

Les budgets précédents ont prévu des baisses d’impôt sur le revenu et des stimulants pour éperonner les investissements visant à rehausser la productivité. Toutefois, même lorsque les entreprises gagnent de l’argent (pour tirer parti des baisses d’impôt ou réclamer des crédits d’impôt), les liquidités à investir sont très limitées. Des ajustements s’imposent donc pour augmenter l’efficacité de ces stimulants :

·         Sous réserve de critères et d’échéanciers définis, les entreprises devraient être autorisées à « encaisser » des crédits d’impôt acquis au préalable (au lieu d’être contraintes de les reporter). Bien qu’ils comptent parmi les plus favorables du monde, les stimulants fiscaux du Canada pour la R‑D à l’intention des entreprises sont sous-utilisés. Cela s’explique dans une large mesure par la difficulté d’avoir accès au programme d’encouragements fiscaux à la RS&DE. La valeur du programme pourrait être grandement rehaussée uniquement en améliorant son administration :

·         Les « nouvelles » restrictions sur les activités de RS&DE admissibles devraient être abolies et l’ARC devrait profiter des examens des politiques actuels pour appuyer plus fortement la recherche, l’innovation et la productivité.

·         L’ARC devrait entreprendre une analyse cartographique de la chaîne de valeur du programme RS&DE, dispenser une formation technique uniforme à ses vérificateurs RS&DE et établir un « programme d’échange » afin pouvoir employer des spécialistes techniques de l’industrie ou d’autres organismes gouvernementaux (p. ex. CNRC, PARI).

Bien que la croissance économique soit un facteur clé pour assurer des services publics durables, il est évident qu’il faut prendre des mesures pour réduire la dette publique. (La crise de la dette en Europe et la révision à la baisse de la cote de crédit des États-Unis le démontrent clairement.) Les gouvernements doivent faire tout en leur pouvoir pour devenir plus efficients, mais les contribuables (y compris l’industrie) doivent quant à eux modifier leurs attentes par rapport aux gouvernements. Nos recommandations visent donc à optimiser la valeur des stimulants existants. Elles contribueraient à stimuler l’investissement du secteur privé sans exercer de nouvelles pressions sur le Trésor public.

1.0  CONTEXTE … « un monde métamorphosé »

Manufacturiers et Exportateurs du Canada (MEC) représente le secteur industriel du pays depuis 1871. Parmi les membres de MEC, on trouve essentiellement de petites et moyennes entreprises, mais nous représentons certaines des plus grandes entreprises du Canada (et la plupart d’entre elles dans la province). Au Nouveau-Brunswick, MEC est « au devant et au cœur » des questions d’ordre fiscal. Nos membres ont pris une part active à de nombreuses consultations établies par le gouvernement afin de réformer les régimes de l’impôt et de la réglementation. À vrai dire, jamais sans doute au cours des trois dernières générations les gouvernements n’ont joué un rôle plus important pour garantir la compétitivité et la durabilité de l’économie.

Le secteur manufacturier et le secteur des exportations du Canada sont un segment essentiel de notre trame économique et sociale. Ils représentent plus de 20 % du PIB canadien et emploient directement près de 2 millions de Canadiens. Un nombre encore plus grand de Canadiens occupent des emplois qui procurent des fournitures et des services à ces secteurs. Chaque dollar de valeur ajouté par le secteur manufacturier engendre environ 3,05 $ d’activité économique globale – soit le plus important multiplicateur économique de tous les secteurs commerciaux. Ces chiffres ne sont nullement un secret pour les Néo-Brunswickquois, étant donné que la province a la troisième économie à plus forte intensité de fabrication du Canada.

Au moment où l’économie mondiale avait trouvé la voie de la reprise pour sortir de la « Grande Récession », les « crises de la dette » en Europe et aux États-Unis laissent maintenant présager un autre détour économique. Évidemment, cela passera comme le reste, mais le monde sera alors probablement différent, car le consommateur américain ne sera sans doute plus le « roi ». Le secteur manufacturier canadien subit lui aussi une métamorphose à cause de la concurrence des économies émergentes, des prix plus élevés de l’énergie et de notre « pétrodevise ». Plus que jamais, il est indispensable de se cristalliser sur l’innovation et la productivité pour assurer la survie du secteur. La diversification des marchés prend elle aussi de plus en plus d’importance. Les États-Unis ont été la destination de 73 % des marchandises exportées par le Canada en 2009, en baisse de 5 points de pourcentage par rapport à l’année précédente.

Cela est particulièrement important pour le Nouveau-Brunswick, car c’est la province du Canada qui est la plus tributaire des exportations et également la plus tributaire du marché américain (88 %). Malgré les forts vents contraires que sont la hausse du taux de change et l’atonie du marché américain, l’économie du Nouveau-Brunswick a avancé de 2,0 % en 2010. Les manufacturiers, qui représentent environ 13 % du PIB provincial, ont également montré leur résilience coutumière. Les expéditions ont augmenté de 21,2 % et sont revenues à leur niveau d’avant la récession. Mais la hausse était surtout attribuable au renchérissement du pétrole et des produits minéraux. Les manufacturiers de la province ont perdu 1 600 emplois, ou 4,7 % de leurs effectifs. La reprise du Nouveau-Brunswick, et de l’économie canadienne, devrait se poursuivre en 2011, mais à un rythme plus lent.

Un régime d’imposition concurrentiel vient systématiquement en tête de liste des difficultés stratégiques auxquelles se heurtent les manufacturiers, d’après le sondage de MEC intitulé Issues Management Survey. Les baisses de l’impôt sur le revenu des sociétés et des particuliers et l’élimination de l’impôt sur le capital viennent toujours en tête des priorités des réformes. La crise du crédit de 2008 a notamment eu comme conséquence des modalités de crédit de plus en plus restrictives (et coûteuses). Le gouvernement fédéral a pris des mesures pour améliorer la situation, mais l’accès au crédit reste encore un grand problème pour les manufacturiers.

2.0  LE BUDGET 2011-2012… « se remettre sur les rails »

Le dernier budget fédéral a présenté la prochaine phase du « Plan d’action économique », qui avait été lancé dans le budget de 2009. Cette année-là, le gouvernement avait déposé son plus important budget de toute l’histoire du Canada en vue d’amortir le choc de l’implosion de l’économie mondiale. Il avait décidé d’injecter 40 milliards de dollars de « mesures de relance » dans l’économie, ce qui équivalait à 2,5 % du PIB, sur deux ans. MEC avait réagi favorablement au budget de 2009, reconnaissant que les mesures visant à « réamorcer la pompe à capitaux » et à investir dans les infrastructures publiques nécessaires étaient indispensables pour éviter un effondrement qui aurait pris des proportions historiques.

Le budget fédéral de 2011-2012 a réaffirmé l’engagement de ramener le taux de l’impôt sur le revenu des sociétés à 15 %. Il a aussi prolongé jusqu’en 2013 la déduction pour amortissement accéléré (deux ans), instaurée en 2007. Cette mesure a été très bien accueillie par les manufacturiers, car il est généralement admis que les décisions de se lancer dans l’achat de grandes immobilisations ne se prennent pas à court terme. La prolongation de la déduction renforce la confiance qui permet d’effectuer les investissements nécessaires dans les technologies visant à accroître la productivité. On évalue que cette mesure se traduit par un rendement sur l’investissement de 12 % sur trois ans et représente jusqu’à 600 millions de dollars en 2012-2013 seulement.

Il faut souligner que la mise en œuvre de la première réforme complète du régime fiscal du Nouveau-Brunswick depuis un quart de siècle a commencé l’an dernier, lorsque les taux de l’impôt sur le revenu des sociétés ont été abaissés d’un point et ramenés à 11 %. Les taux devaient être abaissés à 8 % en 2013 (le taux le plus bas au Canada), mais il a été décidé par la suite de les ramener seulement à 10 %. (Le taux pour les petites entreprises sera cependant réduit de moitié et ramené à 2,5 %.) Ce changement était en partie attribuable à la situation financière difficile de la province, puisque la dette provinciale est passée de 1,7 milliard de dollars à 10,2 milliards de dollars en trois ans.

De fait, l’escalade de la dette publique est préoccupante. Hypothéquer ainsi les générations futures ne peut pas être pris à la légère. Le budget fédéral de 2011-2012 prévoyait que le déficit serait éliminé en 2014-2015. Les déficits accumulés depuis le dernier budget équilibré (2008-2009) auront atteint 145 milliards de dollars et la dette nette aura grimpé à 622 milliards de dollars (ou 30,8 % du PIB).

Même si l’on admet qu’une injection de deniers publics était nécessaire pour atténuer l’impact de la Grande Récession, il est évident qu’il faut prendre des mesures pour réduire la dette publique. La crise de la dette en Europe et la révision à la baisse de la cote de crédit des États-Unis le démontrent clairement. Les gouvernements doivent faire tout en leur pouvoir pour devenir plus efficients, mais les contribuables (y compris l’industrie) doivent quant à eux modifier leurs attentes par rapport aux gouvernements.

Évidemment, la croissance économique est aussi un facteur clé pour assurer des services publics durables. À cet égard, il faut établir un plan stratégique à plus long terme pour faire face aux chocs sismiques de l’économie mondiale. D’autres mesures s’imposent pour stimuler les investissements dans de nouvelles technologies, de nouveaux marchés, les compétences et l’innovation afin de maximiser les chances de l’industrie canadienne tandis que l’économie mondiale sort de la récession.

3.0  LE BUDGET 2012-2013… « une vision à long terme »

Il est prévu que le prochain budget fédéral poursuivra la mise en œuvre de son « plan prévoyant des impôts bas pour stimuler la croissance et l’emploi », qui met l’accent sur « les principaux vecteurs de la croissance économique, c’est-à-dire l’innovation, l’investissement, l’éducation et la formation ». Le gouvernement a déclaré qu’il se concentrera sur des mesures durables qui créent les conditions propices à la prospérité économique à long terme et qu’il prévoit que le secteur privé redeviendra le moteur de la croissance et de la création d’emplois.

MEC soutient depuis longtemps qu’il est essentiel de se donner des assises solides pour assurer une croissance soutenue. Cela présuppose l’instauration de régimes d’imposition et de réglementation concurrentiels à l’échelle mondiale. MEC s’est félicitée des mesures prises par les gouvernements fédéral et provinciaux pour réduire les taux de l’impôt sur le revenu des sociétés de manière à les aligner sur ceux de la plupart de nos principaux concurrents. Mais en plus d’une baisse des impôts sur le revenu, les stimulants qui visent les investissements dans le capital humain et physique et la R‑D sont aussi un instrument de politique publique puissant et nécessaire.

Cela fait un demi-siècle que l’on s’interroge sur l’efficacité de divers crédits d’impôt. Il est clair cependant que les crédits d’impôt non remboursables et les stimulants fiscaux qui ne peuvent pas être réalisés à court terme sont inefficaces, en particulier lorsque la conjoncture économique est telle qu’elle est. De même, même lorsque les entreprises gagnent de l’argent (pour réclamer des crédits d’impôt), les liquidités à investir sont très limitées. Manifestement, des mesures peuvent être prises pour maximiser (de façon rentable) l’efficacité des crédits d’impôt dont l’objectif est d’éperonner les investissements du secteur privé.

3.1  CRÉDITS D’IMPÔT À L’INVESTISSEMENT … « déverrouiller les capitaux »

Les crédits d’impôt à l’investissement (CII) sont étroitement liés à la déduction pour amortissement comme levier de politique fiscale pour la formation de capital. La Loi de l’impôt sur le revenu du Canada prévoit que les CII peuvent être réclamés au titre d’investissements dans la recherche et le développement, d’apprentissages et de garde d’enfants ainsi que des coûts miniers avant la production. Elle prévoit également un CII de 10 % au titre des investissements dans « un bien admissible » qui doit servir à la fabrication et à la transformation dans le Canada atlantique et en Gaspésie. Il y a également des dispositions sur les CII dans diverses lois fiscales provinciales et territoriales. Par exemple, le gouvernement du Nouveau-Brunswick a institué un CII de 50 %, sur deux ans, à l’égard des impôts fonciers pour les activités du secteur forestier.

Comme nous l’avons vu plus haut, la valeur intrinsèque de ces stimulants dépend des délais au cours desquels ils seront réalisés. Comme l’a si bien dit un membre de MEC, « les crédits d’impôt sont essentiellement inutiles durant une récession ». À cet égard, il existe une authentique occasion de maximiser la valeur des CII en vertu d’un « rachat » par le gouvernement des crédits d’impôt. Sous réserve de critères et d’échéanciers définis, les entreprises doivent être autorisées à « encaisser » des crédits d’impôt acquis au préalable (au lieu d’être contraintes de les reporter). Les critères pourraient englober les plans de l’entreprise en matière d’investissements futurs, la valeur de l’investissement pour les politiques publiques, la solvabilité de l’entreprise, etc. L’échéancier de tout « rachat » pourrait varier en conséquence.

Une telle mesure procurerait aux entreprises les fonds nécessaires pour engager les investissements visant à rehausser leur productivité durant la reprise de l’économie mondiale. Elle injecterait également des capitaux qui font cruellement défaut dans l’économie canadienne. Et elle y parviendrait sans qu’il soit nécessaire d’engager des investissements publics à caractère non durable ou d’octroyer des subventions aux entreprises. Cette mesure n’irait pas jusqu’à rendre tous les CII entièrement (et immédiatement) remboursables. Elle ne réduirait pas les recettes fiscales existantes globales pour les pouvoirs publics et protégerait donc ainsi les deniers publics.

3.2 CRÉDITS D’IMPÔT POUR LA RS&DE… « redéfinir l’innovation »

Le crédit d’impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental (RS&DE) est le programme fédéral le plus important qui appuie la R‑D des entreprises au Canada. L’avantage économique du programme RS&DE est largement reconnu. On évalue que les crédits d’impôt admissibles (4 milliards de dollars) permettent des investissements quatre fois plus élevés dans la R‑D du secteur privé. En outre, le crédit d’impôt à la RS&DE entraîne un gain économique brut de 1,11 $ pour chaque dollar qui lui est consacré. Les retombées économiques l’emportent donc largement sur les coûts du crédit.

Dans ce « nouvel ordre mondial », il est essentiel de miser sur l’innovation des produits, des procédés et du marketing pour assurer la compétitivité des manufacturiers canadiens et pour qu’ils continuent à contribuer à notre niveau de vie. À l’heure actuelle, les manufacturiers représentent plus de la moitié de tous les investissements des entreprises canadiennes dans la R‑D. Pour chaque dollar consacré à la R‑D, les manufacturiers investissent 32 $ dans la conception, le génie, la production et la commercialisation de nouveaux produits et services. Les manufacturiers comptent parmi les principaux bénéficiaires du crédit d’impôt à la RS&DE, puisqu’ils représentent environ 40 % des entreprises qui demandent des crédits d’impôt et 47 % de la valeur globale des crédits accumulés chaque année.

Étant donné l’importance du crédit à la RS&DE, plusieurs anciens ministres du Revenu national se sont engagés à maintenir le programme. L’Agence du revenu du Canada (ARC) a cependant élaboré de nouvelles politiques afin de restreindre la définition des activités admissibles et d’exclure des travaux qu’ARC juge « courants ». Un problème particulier est la définition proposée par l’ARC du critère de l’avancement de la technologie. Les activités admissibles semblent ne comprendre désormais que le développement de nouvelles technologies de base. Les légères améliorations apportées à l’application de technologies existantes afin d’améliorer des matériaux, des produits, dispositifs ou procédés ne semblent plus être considérés admissibles. Ces modifications de l’interprétation de l’ARC ne se fondent sur aucune modification législative.

Malgré le fait que l’examen des politiques de l’ARC n’est pas encore terminé, quelques grands noms de la R‑D au Canada ont signalé que de nombreuses demandes de crédit d’impôt qui étaient acceptées auparavant par les vérificateurs sont désormais refusées. De plus, le gouvernement du Canada a lancé l’an dernier un examen approfondi du soutien fédéral à la R‑D, sous la direction d’un groupe d’experts (Jenkins). Un document de consultation est examiné actuellement par l’industrie. La coordination de l’examen des politiques de l’ARC et des délibérations du groupe d’experts est essentielle pour assurer une politique publique cohérente et efficace. Les « nouvelles » restrictions sur les activités de RS&DE admissibles devraient être abolies. De plus, l’ARC devrait profiter des examens des politiques actuels pour appuyer plus fortement la recherche, l’innovation et la productivité.

3.3 CRÉDITS D’IMPÔT POUR LA RS&DE… « alléger le processus »

Le programme de RS&DE du Canada offre, sur papier, l’un des stimulants fiscaux les plus généreux accordés à la R‑D du secteur privé de tous les pays développés. Toutefois, le programme n’est pas utilisé au maximum de ses capacités. Le dernier Management Issues Survey de MEC, un sondage mené auprès de plus d’un millier d’entreprises au Canada, le confirme. Les résultats montrent qu’à peine 34 % des répondants au sondage se prévalent de ce programme. Bien sûr, ce faible taux de participation s’explique par un certain nombre de raisons. Il est manifeste cependant que l’administration complexe, coûteuse et incohérente a entraîné de longs délais dans les vérifications et a accru les coûts de transaction, ce qui, pour beaucoup d’entreprises, a amoindri la valeur du programme. Cela soulève aussi des questions sur le rôle du programme comme stimulant de l’innovation.

On discute en long et en large de l’administration du programme depuis au moins dix ans. L’engagement a été pris dans le budget fédéral de 2008 de corriger la situation. Les mesures doivent viser à simplifier le formulaire de demande (T661) et le guide; élaborer un outil d’auto-évaluation de l’admissibilité; et (tel qu’indiqué ci-dessus) examiner les politiques en matière de RS&DE et les procédures connexes (règlement des différends). Des ressources supplémentaires ont aussi été prévues pour renforcer les méthodes d’assurance de la qualité et accroître la capacité scientifique des fournisseurs du service.

Nous félicitons le gouvernement – et l’ARC – pour cette initiative, mais il faut attendre plusieurs années avant d’en profiter. Les membres de MEC signalent que la documentation exigée par les vérificateurs de l’ARC ne cesse d’augmenter et devient un fardeau trop lourd. Compte tenu de la « crise » à laquelle est confronté le secteur manufacturier canadien, il est crucial que d’autres mesures soient prises sur ce « front » et à un rythme plus rapide. Afin de simplifier la procédure d’examen des demandes, MEC recommande que l’ARC entreprenne une analyse cartographique de la chaîne de valeur. L’expérience a démontré que cela peut entraîner des économies de temps et d’efficacité de 30 à 40 % grâce à la réaffectation des ressources existantes et la détermination des lacunes de formation.

Nous savons bien que les fonctionnaires de l’ARC sont formés pour récupérer de l’argent et non pour en distribuer. Ils ont donc une tendance naturelle à évaluer les demandes de crédit à la RS&DE d’un « œil critique ». Bien qu’une évaluation rigoureuse soit indispensable à l’intégrité du programme, elle ne doit pas compromettre abusivement les avantages du programme. Afin d’instituer une interprétation plus uniforme des critères d’admissibilité, il est recommandé que les vérificateurs suivent une formation technique uniforme et que l’ARC songe à un programme d’échange pour ses vérificateurs qui lui permettra d’employer des spécialistes techniques de l’industrie ou d’autres organismes gouvernementaux, comme le CNRC ou le PARI.